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Histoire de la Guinée-Bissau

Empire du Ghana
Empire du Ghana du XIe au XIIIe siècle

Empire du Mali
Empire du Mali du XIII au XVIIe siècle

Carte de la Guinée portugaise datant de 1843
Carte de la Guinée portugaise datant de 1843 (cliquez pour agrandir)

Femme Pepel de Guinée-Bissau
Le costume traditionnel d'une femme Papel en 1906

Jeune féticheuse manjak de l'île de Pecixe
Jeune féticheuse manjak scarifiée sur l'île de Pecixe

Drapeau de la Guinée portugaise
Drapeau de la Guinée portugaise

L'histoire de la Guinée-Bissau ne remonte pas aux quelques années qui ont secoué cette petite république africaine depuis plus de quinze ans. Les troubles qui sont continuent jusqu'à aujourd'hui (présidence par intérim) et qui ont causé la mort de trop de personnes ne doivent pas occulter le passé si riche de la Guinée.
La Guinée-Bissau n'a été "découverte" par les Européens que moins de 50 ans avant que Christophe Colomb ne foule le continent américain. En effet, 1446 marque le début de l'établissement portugais sur les côtes bissau-guinéennes mais également le début d'une résistance à l'envahisseur des populations locales qui allait durer jusqu'au 20ème siècle. En effet, le premier navigateur portugais Nuno Tristão est tué en 1446 et le dernier portugais avant la guerre de libération sera tué en 1939 par les guerriers Bijagos. Le premier comptoir sera Bolama, situé sur l'île du même nom, en face de l'actuelle Bissau au cœur de l'Empire du Gabù. Le commerce peut alors commencer : or, ivoire, poivre... et esclaves.

L'histoire coloniale

Au XIIIème siècle, les peuples Nalu et Landuma s'installent dans la région à la faveur du déclin de l'Empire du Ghana. C'est seulement au XIVe siècle, en 1446, alors que la région est en passe d'être intégrée au vaste Empire du Mali (qui comprend les actuels Sénégal, Guinée, Gambie et Mali,...) que les premiers navigateurs portugais établissent des contacts.

L'histoire coloniale commence, comme partout dans le monde, par l'établissement de quelques comptoirs commerciaux qui permettront aux Portugais d'acheter des esclaves ou de l'or. La richesse et le potentiel de la Guinée-Bissau la feront se faire disputer également par les Français, les Hollandais et les Anglais.

En 1588, les Portugais fondent Cacheu, dans l'estuaire du Rio Cacheu, qui devient ainsi la première implantation portugaise dans la région qui sera dès lors dirigée par des gouverneurs directement nommés par le roi du Portugal sous la juridiction du Cap Vert. La deuxième grande implantation coloniale sera Gêba, bien à l'intérieur des terres (à une quinzaine de kilomètres de Bafatá).

Dès le milieu du XVIIe siècle, les Portugais accélérent la cadence coloniale : en 1642, ils fondent Farim et Ziguinchor (aujourd'hui au Sénégal) en déplaçant des familles de colons depuis la ville de Gêba. C'est à la même époque que les estuaires du Rio Buba, du Rio Cacheu, du Rio Gêba et du fleuve Casamance commencent réellement à être fréquentés en vue d'échanges commerciaux et de colonisation de masse.

Entre 1753 et 1775, la construction de la forteresse de Bissau s'effectue grace au travail de Capverdiens spécialement déplacés pour ces travaux. En 1800, l'Angleterre commence à faire sentir son influence en Guinée Bissau en revendiquant la tutelle de l'île de Bolama, de l'archipel des Bijagos, de Buba et de tout le littoral Sud.

A la fin du 19ème siècle, l'abolition de l'esclavage est imposée par les patrouilles de surveillance de la marine britannique. Ainsi, l'exportation des produits agricoles vers l'Europe devint l'activité principale des puissances coloniales en Afrique occidentale. Le Portugal n'étant pas un pays riche et n'ayant que peu de ressources, il ne pût développer ses colonies. Le gouvernement portugais était si faible qu'il permit aux compagnies européennes de contrôler et d'exporter les richesses de la Guinée, principalement l'arachide et l'huile de palme.

En 1870, grace à l'arbitrage du président américain Grant, l'Angleterre renonce à ses revendications en Guinée-Bissau. Malgré ce partage effectif du pays par les puissances coloniales, les royaumes locaux continuent à résister à toute tentative de colonisation et d'expropriation. Les Floups, une des communautés diola les plus puissantes et présente principalement vers Oussouye en Casamance sénégalaise, mènent contre les Portugais la bataille de Djufunco en 1879. Cette bataille se soldera par la plus grande déroute portugaise de l'histoire coloniale. Cette résistance sévère des Diolas mènera le Portugal à accentuer sa pression sur le pays en lui donnant plus de prérogatives : la Guinée est séparée de la Province du Cap Vert et la nouvelle Province de Guinée Portugaise qui aura comme capitale Bolama.

Commencent alors l'occupation militaire du pays par l'armée portugaise et les actions punitives contre les guerriers Pepels de Bissau et du Biombo (1882-1884), contre les Balantes à Nhacra (1882-1884), contre les Manjaks à Caió (1883) et contre les Beafadas à Djabadá (1882). L'adage "diviser pour mieux règner" fait alors le bonheur du colon portugais qui utilise à bon escient les antagonismes ethniques en armant les communautés ethniques les unes contre les autres comme en 1881-1882 où les Peuls Noirs (musulmans) sont armés contre les Peulhs Rouges (animistes).

Malgré tout, la tension militaire et la rebellion permanente font que le pouvoir colonial portugais se limite aux villes-forteresses occupées par l'admnistration et l'armée : Bissau, Bolama, Cacheu Farim et Gêba. Cette insécurité n'empêche pas la mise en production agricole des terres littorales par les colons portugais ou du monde lusophone (notamment des Caverdiens).

C'est seulement en mai 1886 que les frontières de la Guinée-Bissau sont fixées en accord avec la France qui possède le Sénégal et la Guinée Conakry. La Casamance passe alors sous domination française en échange de la région de Cacine qui passe sous contrôle portugais.

Mais la rebellion reprend de plus belle dès la fin du XIXe siècle avec une vague insurrectionnelle dans l'Oio (en 1897 et 1902), dans le pays Floup (encore...) en 1905 et à Bissau en 1908 qui voit l'alliance des Pepels et des Balantes de Cuméré pour une offensive meurtrière. Entre 1910 et 1925, une période de conflit permanent alternant des insurrections autochtones et la répression coloniale sera appelée "la guerre de pacification". Il s'agissait plutôt en guise de pacification d'assassiner les chefs locaux les plus rétifs tout en accentuant l'impôt sur les populations locales. Entre victoires et déroutes des populations insoumises, deux noms resteront dans l'histoire de la répression sanglante : le premier fut João Teixeira Pinto, militaire à la longue expérience coloniale et qui entre 1913 et 1915 lança des actions sanguinaires qui virent le massacre des populations locales durant la campagne de l'Oio (pays balante). Le second fut Abdul Indjai (Abdoul Ndiaye), un Wolof sénégalais (les Wolofs furent les plus grands vendeurs d'esclaves dans cette partie de l'Afrique). Abdul Indjai qui fut l'auxiliaire cruel de Teixeira Pinto dans la bataille de Canchungo, finit par se rebeller et fût arrêté à Mansabá en 1919 avant d'être déporté vers le Cap Vert et plus tard à Madeire (peut-on faire confiance à un Sénégalais ?). A leur tour, les Bijagos se révoltent entre 1917 et 1925 harcelant l'armée portugaise dans tout l'archipel et jusqu'à Bolama. En 1918, les Bayots et les Floups (encore des Diolas) entament une nouvelle guerilla meurtrière contre le Portugal. C'est à cette période qu'une nouvelle administration légiférant la ségrégation colonialiste est mise en place en Guinée-Bissau. Elle formalise :

- la division de la population entre "civilisés" et "indigènes"
- la légalisation du recrutement sous le régime du travail obligatoire
- l'imposition du lieu de résidence et ainsi la limitation de la circulation des "non civilisés" en dehors de leur village
- le type de relations entre l'administration coloniale, les auxiliaires indigènes et les autorités coutumières (rois locaux, chefs de village, etc...)

En 1921, à la prise de fonction du gouverneur Jorge Velez Caroço, de nouvelles alliances verront les musulmans - et notamment les Peulhs, être privilégiés par le pouvoir colonial au détriment des communautés animistes mal organisées.

Entre 1925 et 1940, ce sont à nouveau les Pepels de Bissau qui se révoltent, suivis en 1933 par les Floups de Jufunco qui font du pays Diola (extrême Nord-Ouest) une région toujours incontrôlée. Les Bijagos de l'île de Canhabaque (île Roxa) suivent le mouvement de révolte en 1935-36 et refusent de payer l'impôt au pouvoir colonial. Malgré cette insurrection quasi-généralisée, l'administration coloniale lance la construction d'infrastructures : routes, ponts et élargissement du réseau électrique, etc... La principale culture d'exportation, l'arachide, est également développée.

C'est également à cette époque que les grande entreprises de capital portugais viennent se créer ou s'implanter en Guinée portugaise. C'est le cas de l'Estrela de Farim et de la Casa Gouveia qui commercialisent l'arachide et gèrent la distribution de produits dans tout le territoire. Dans le même temps, de grandes exploitations agricoles sont également développées dans les rares régions pacifiées : le long du Rio Grande de Buba, autour de Bissau et dans le pays peulh (Bafatá et Gabú). Cet essor économique portugais est favorisé par le coup d'état de Lisbonne en 1926 : le dictateur Salazar prit le pouvoir et imposa des droits de douane restrictifs aux compagnies étrangères présentes en Guinée, les forçant à se vendre aux intérêts portugais.

L'organisation sociale coloniale pyramidale en ce milieu de XXème siècle trouve en son sommet une poignée de dirigeants et de cadres techniques portugais. Le niveau intermédiaire est composé de fonctionnaires, majoritairement capverdiens (75% !). Cette communauté capverdienne domine également le secteur commercial. Le niveau social le plus défavorisé est évidemment composé des natifs bissau-guinéens qui occupent des fonctions de domestiques, d'artisans et d'agriculteurs.

En 1942, Bissau qui était déjà de facto la capitale économique et la plus grande "ville" du pays devient la capitale administrative de la Guinée portugaise aux dépens de Bolama.

En 1950, sur les 512.255 habitants de Guinée portugaise, seuls 8320 étaient considérés comme "civilisés" (dont 2273 blancs, 4568 métis, 1478 noirs et 11 indiens). Sur ces 8320 civilisés, 3824 étaient analphabètes (541 blancs, 2311 métis et 772 noirs). En 1959, à la veille de la vague d'indépendances africaines, seuls 3525 élèves fréquentaient l'enseignement primaire et 249 le lycée Honório Barreto (créé l'année précédente). L'Ecole Industrielle et Commerciale de Bissau accueillait quant à elle 1051 élèves. Le Portugal aborde donc les années 50 avec un bilan désastreux : les provinces de Guinée portugaise sont toujours insoumises, le pays n'a que peu d'infrastructures et les systèmes scolaires et sanitaires sont quasi-inexistants.

Liste des gouverneurs de la Guinée-Bissau

Amilcar Cabral
Amilcar Cabral,
le héros de l'Indépendance

Guerre d'indépendance
Jeunes filles partant au
combat durant la guerre
(photo Mario de Andrade)

Amilcar Cabral et ses hommes au front
Amilcar Cabral et ses
lieutenants pendant la Guerre
(photo Mario de Andrade)

Amilcar Cabral
Amilcar
(photo Mario de Andrade)

Affiche de propagande portugaise : "Guinée portugaise : Guinée heureuse"
Affiche de propagande portugaise : "Guinée portugaise : Guinée heureuse"

Affiche de propagande portugaise :
Affiche de propagande portugaise :
"Présentez-vous devant l'armée en levant les bras"


Intérieur du Fort S.JOSE à BISSAU au
début du siècle. Ce fort était le point de départ des troupes coloniales pour la conquête du territoire.

HISTOIRE DU PORTUGAL ET DE SON EMPIRE COLONIAL<BR></A>A-H de OLIVEIRA MARQUES
HISTOIRE DU PORTUGAL ET DE SON EMPIRE COLONIAL
de OLIVEIRA MARQUES

Voir aussi la page "des photos de jadis" avec des cartes postales anciennes de Guinée-Bissau


Nino Vieira
Nino Vieira : ex-président de la Guinée-Bissau et ex-narcotraficant notoire

La lutte pour l'Indépendance

De la fin des années 50 jusqu'au début des années soixante beaucoup de pays en Afrique accédaient à l'indépendance. Mais le Portugal refuse d'abandonner ses colonies. Les Portugais se sont rendus compte que si elles étaient libérées, le néo-colonialisme de Salazar ne pourrait pas être imposé. Ainsi, alors que d'autres pays devenaient libres, l'emprise sur la Guinée s'affermit. Le résultat fût la plus longue guerre de libération que connut l'Afrique : une guerre de "guerilleros" menée par le PAICG avec l'aide significative d'Union Soviétique et du Cuba.

Dans les années 50, alors que le pays ne s'était jamais vraiment soumis à l'occupant portugais et que plusieurs régions africaines s'émancipent, les idées indépendantistes commencent à germer et mènent à la création en 1956 du Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée et du Cap Vert (PAIGC) dont le fondateur n'est autre qu'Amilcar Cabral.

La fin de la décennie marquera le début de la fin pour le Portugal en raison d'un évènement aujourd'hui entré dans l'histoire de la Guinée-Bissau. Le 3 août 1959, la grève des marins et dockers du port de Bissau est violemment réprimée par l'armée portugaise : plus de 50 morts seront à déplorer et cette journée restera dans l'histoire comme le "massacre de Pidjiguiti". C'est l'étincelle qui fera prendre au PAIGC la voie de la lutte armée et le chemin de la guerre d'indépendance.

Quatre années seront nécessaires au PAIGC pour s'organiser et s'armer. Cette guerre de libération commencera vraiment en 1963 et grâce à des actions de guerilla permettra à l'armée de libération d'occuper 5 ans plus tard, en 1968, plus de deux tiers du territoire.

Désormais politiquement et militairement bien organisé, le PAIGC réussit rapidement à s'attirer la sympathie et la bienveillance de plusieurs nations du monde telles que la Suisse, l'Union Soviétique, la Chine et de nombreux pays du tiers-monde dont le Maroc et la Guinée Conakry. Le monde intellectuel, diverses forces sociales et politiques ainsi que la jeunesse des pays d'Europe occidentale et des Etats-Unis soutiennent ce mouvement d'émancipation et lui permettent d'obtenir en plus des appuis matériels et logistiques une tribune pour exprimer les doléances du peuple bissau-guinéen : Amilcar Cabral pourra s'exprimer à l'ONU et ira même jusqu'à être reçu par le pape Paul VI au Vatican en compagnie des leaders des autres mouvements de libération du monde lusophone (FRELIMO du Mozambique, MPLA d'Angola).


Voir la déclaration d'Oussouye (Casamance) du Président de la République Sénégalaise, Léopold Sédar Senghor durant la Guerre d'Indépendance de Guinée-Bissau.


le gouverneur, le Général António de SpínolaConscient de la rapide déroute portugaise, le gouverneur, le Général António de Spínola (1968-73), s'essaye à une stratégie de division entre le PAIGC et les populations locale en arguant du fait avéré que les cadres du PAIGC étaient pour la plupart des métis capverdiens, Amilcar Cabral le premier. Son programme “Por uma Guiné Melhor” (Pour une Guinée Meilleure) est censé offrir plus d'équité et de justice à ceux qui, il y a si peu de temps, faisaient partie, pour l'administration, des "non civilisés".

Ce programme "Pour une Guinée Meilleure" reposait sur :

le parti fasciste União Nacional1) le parti fasciste União Nacional (illustration à droite : le logo du parti)
2) la petite bourgeoisie locale indispensable pour ses compétences administratives et ses liens avec le Portugal
3) la promotion accélérée d'une nouvelle petite bourgeoisie composée uniquement de "vrais fils du pays" promus socialement dans l'administration, dans la hiérarchie des troupes d'élite et, qui bénéficiant d'une telle situation, sur lesquels on pourrait un jour compter.
4) l'encouragement d'une rivalité entre ces deux bourgeoisies, laissant aux Portugais le soins de jouer les justes arbitres
5) le jeu de la carte ethnique basé sur le pouvoir traditionnel valorisé avec la création des "assemblées du peuple" (chaque communauté ethnique avait son assemblée) : les rivalités entre les différentes assemblées focalisaient les rancoeurs en faisant oublier pour un temps que l'occupant portugais était à la base du problème. Le recrutement militaire permettait également la division du pays grâce à un recrutement ethnique attirant sur l'éthnie recrutée la haine des ethnies maintenues en dehors de l'armée d'occupation.



Un autre aspect important du programme "Pour une Guinée Meilleure" reposait sur une propagande aggressive et omniprésente :

- implication directe des militaires, base du véritable pouvoir colonial, dans la propagande en vue de diminuer l'influence du PAIGC. Pour s'attirer la sympathie du peuple, l'armée ira jusqu'à prêter ses camions pour le transport de matérieux de construction des habitations dans les villages !
- augmentation du nombre d'enseignants dans le primaire (les zones contrôlées par le PAIGC avaient créé leur propre système scolaire)
- amélioration du système de santé par la construction de dispensaires
- promotion des populations locales dans le sport et notamment dans les équipes de football
- développement et utilisation intensive des médias : journaux télévisés, radio, programmes culturels, temps d'antennes en langues locales offerts aux différentes communautés ethniques
- diffusion à grande échelle de prospectus de propagande
- déplacement en personne du gouverneur Spínola (qui deviendra en 1974 le président du Portugal) arrivant du ciel en hélicoptère pour palabrer, entouré d'enfants, avec la population et écouter leurs doléances (manque de riz ou d'écoles).

La carotte n'était bien sûr qu'une partie de la politique du gouverneur. Le bâton avait plus que jamais sa place : ceux qui n'étaient pas "du bon côté" étaient châtiés sans pitié (nombreuses excécutions arbitraires).

Malgré toute cette énergie dévouée au programme "Pour une Guinée Meilleure", cette opération était morte-née. L'indépendance était inéluctable en dépit de l'aveuglement du Portugal qui pensera règler le problème d'une manière pour le moins expéditive : il fera assassiné le 20 janvier 1973, à Conakry, Amilcar Cabral, leader du PAIGC, par petit commando armé. Cet évènement, au lieu de retarder la conclusion du conflit ne fit que la précipiter. En mars de cette même année, le premier avion de combat Fiat G-91 est abattu par un missile sol-air Strella. En représailles de l'assassinat d'Amilcar Cabral, une opération militaire d'envergure portant le nom du défunt leader est en outre lancée dans le quart sud-ouest du pays pour prendre la place forte de Guiledje, entre Quebo et Cacine, précipitant la fin de la présence portugaise en Guinée. Le 22 mai 1973, le Sud-Ouest de la Guinée est conquis et occupé par le PAIGC.

Quatre plus tard, le 24 septembre 1973, la première Assemblée Nationale Populaire est convoquée pour déclarer l'indépendance et la création de l'état souverain de la République de Guinée-Bissau. Ce nouvel état est immédiatement reconnu par 63 pays de la communauté internationale et rentre à l'ONU. Luís Cabral, demi-frère d'Amilcar est alors élu premier Président de la République. C'est à 5000 kilomètres de la Guinée-Bissau que se scellera la dernière étape du processus menant le pays mais aussi les autres colonies portugaises à l'indépendance totale : le 25 avril 1974, les militaires portugais conscients du désastre militaire et de la nécessité de mettre fin à l'empire colonial déclenchent la "Révolution des Oeillets" qui met fin à 48 années de dictature. Les forces d'occupation sont immédiatement retirées de Guinée-Bissau.

L'indépendance

Dès l'indépendance, le nouveau gouvernement du PAIGC connut de nombreux problèmes. Les Portugais n'avaient en effet vu dans la Guinée qu'un grenier à arachides et à huile de palme. A l'inverse des colonies françaises et anglaises, aucune véritable infrastructure n'avait jamais été construite. Que restait-il de ces 500 ans de colonisation ? Une brasserie destinée à fournir la bière aux troupes portugaises, quelques petites usines pour le décorticage du riz et de l'arachide, 14 diplômés d'Université, et pas un seul docteur ! Un analphabétisme touchant 95% de la population, une espérance de vie de 35 ans et 45% des enfants morts avant l'âge de cinq ans.

Les premières années d'indépendance sont marquées par un gouvernement dirigé par un "parti-état" comme dans la plupart des nouvelles républiques communistes. Les structures administratives restent cependant calquées sur le modèle colonial. Le PAIGC omniprésent dans l'appareil d'état peut alors imposer un dirigisme sans faille et un système autoritaire.

Le 14 novembre 1980, le Président Luís Cabral voulant unifier le Cap Vert et la Guinée-Bissau est renversé par un coup d'état. Ce push, commandité par le premier ministre en fonction Nino Vieira, brise l'unité Guinée-Bissau/Cap Vert qui avait mené les deux entités à l'indépendance. Une période de purge commence alors. Dissidents et opposants en feront les frais.

Durant des années, la Guinée-Bissau a suivi la voie africaine du Marxisme Léninisme, c'est à dire "rien au peuple et tout au gouvernement". Un pouvoir familial s'est instauré et le pays s'est fermé au monde. Rares sont donc les étrangers qui connurent la Guinée-Bissau avant le début des années 90. Les rares entreprises étaient bien-sûr dirigées par l'État. Les conditions économiques étaient si mauvaises que trouver de la nourriture était presque une activité clandestine; les ménagères pouvaient passer quatre ou cinq heures par jour à chercher les denrées nécessaires.

Le processus "d'ajustement structurel" imposé par la Banque Mondiale et qui fera le malheur de nombreux pays pauvres est introduit en Guinée-Bissau en 1985 pour mener à de nombreuses réformes économiques et en particulier à la libéralisation de ce secteur. Cette libéralisation économique sera suivie six ans plus tard, en 1991, par la libéralisation politique avec le fin du PAIGC parti unique.

La fin des années 90 est marquée par l'ouverture progressive du pays. La situation économique n'a cependant jamais été aussi mauvaise qu'à cette période : toutes les infrastructures tombent en ruine y compris à Bissau : eau courante disponible deux heures par jour, en même temps que l'électricité et services publics en faillite. L'inflation permanente du pesos bissau-guinéen rend les achats de produits aventureux : les prix augmentent chaque jour et la plus grosse coupure, 10.000 pesos, ne permet rien d'acheter si bien que les billets sont agrafés par liasses de 10...

Pour remédier à cela, la Guinée-Bissau choisit en 1998 de passer au franc CFA, monnaie partagée par la plupart des pays francophones d'Afrique et qui est protégée par la Banque de France. Cette transition monétaire sera l'une des causes d'une période tourmentée qui dure jusqu'à présent : lors du passage au CFA, les Bissau-Guinéens ont été invités à changer tous leurs pesos contre la nouvelle monnaie. Si ce changement stoppa l'inflation elle provoqua une brusque et importante augmentation des prix qui priva la population urbaine des produits alimentaires les plus nécessaires. La colère de la population procura à l'armée, dirigée par un héros de la guerre d'indépendance, le général Ansumane Mané, une raison et une occasion de se soulever tout en ayant un grand soutien populaire. Ecarté de l'armée par le président Vieira quelques jours auparavant au prétexte de soutenir la rébellion en Casamance (Sénégal), Ansumane Mané déclencha une insurrection en formant une junte militaire. Vieira est renversé par la junte le 7 mai 1999.

C'est le début d'une période instable qui dure encore en 2012 et durant laquelle coups d'état et gouvernements transitoires vont se succèder.

En février 2000, Kumba Ialá, leader de l’opposition, fut élu à l’issue de deux tours d'une élection présidentielle qualifiée de transparente par les observateurs. Il établit un gouvernement provisoire, mais le retour à la démocratie fut compliqué par une économie dévastée par la guerre civile et la propension de l’armée à s’immiscer dans les affaires gouvernementales.

En septembre 2003, un coup d’État mené par le Général Veríssimo Correia Seabra déposa Ialá. Reportées plusieurs fois, les élections législatives eurent finalement lieu en avril 2004. Seabra fut tué en octobre de la même année par des factions mutinées. D’après le premier ministre Carlos Gomes, les mutins étaient des soldats au service de l’ONU rentrés du Libéria et insatisfaits de n’avoir pas encore été payés. Vieira, de retour de son exil au Portugal, fut réélu président le 24 juillet 2005. Ce retour sera de courte durée puisque le 2 mars 2009, ce bon vieux Nino "Cocaïne" Vieira est enfin assassiné sans doute pour des affaires liées aux barons de la drogue colombiens qu'il protègeait au grè de ses envies. Depuis cette date du 2 mars 2009, le pays a connu 3 chefs d'états dont deux par intérim (c'est le cas ce jour 24 mars 2012) et un président élu Malam Bacai Sanha mort du SIDA à Paris le 9 janvier 2012.

VOIR LA PAGE SUR LA GUERRE EN GUINEE-BISSAU

VOIR LA LISTE DES CHEFS D'ETAT DE LA GUINEE-BISSAU

Bibliographie

  • (en) Richard Lobban et Peter Karibe Mendy, Historical dictionary of the Republic of Guinea-Bissau, Scarecrow Press, Lanham (Md.), Londres, 1997 (3e éd.), XXIII-411 p. (ISBN 0-8108-3226-7)
  • (fr) René Pélissier, Naissance de la « Guiné » : Portugais et Africains en Sénégambie, 1841-1936, Pélissier, Orgeval, 1989, 485 p. (ISBN 2-902804-08-3)
  • (pt) Zamora Induta, Guiné, 24 anos de independência, 1974-1998, Hugin, Lisbonne, 2001, 196 p. (ISBN 972-794-078-1)
  • (pt) Fernando Amaro Monteiro et Teresa Vázquez Rocha, A Guiné do século XVII ao século XIX : o testemunho dos manuscritos, Ed. Prefácio, Lisbonne, 2004, 287 p. (ISBN 972-8816-61-8)
  • (pt) Gomes Eanes de Zurara, Crónica dos feitos de Guiné (préface, sélection et notes de Álvaro Júlio da Costa Pimpão), Livraria Clássica Editora A.M. Teixeira, Lisbonne, 1942, 85 p.
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